Samarcande

 Si une etape de notre premiere partie de voyage rejoint la legende de la route de la Soie, c'est bien cette semaine a Samarcande, qui sans doute plus que Bukhara incarne dans les imaginaires la quintessence de cette Asie Centrale, d'Emirs sanguinaires  et batisseurs, de longues caravanes de chameaux dans les sables, et de mosquees et mederesas turquoises et flamboyantes.

Mais comme le montre cette premiere photo, on atteint le coeur historique de l'actuelle Samarcande timuride, en traversant les ruines de la cite antique, l'Afrasiab des Sogdiens detruites par Gengis Kahn lors de son passage. Arrives en bus de Bukhara en fin de matinee, on a rejoint le centre a pied, dans un brouillard un peu dense et sous un ciel gris peu encourageant. Et on a donc parcouru ces monticules terreux, dont la municipalite a reconstruit une porte d'entree qui debouche sur la ville historique actuelle.

Symboles de caravane et de chasses au tigre comme sur des mosaiques antiques ornent les murs.

Mais voici la vue qu'on peut avoir losqu'on marche dans l'antique Afrasiab.

Le musee construit au centre de cette ville antique conserve cependant de belles fresques, representant le roi sogdien Varkhouman, du VII eme siecle, avec des ambassadeurs venant rendre hommage.

A l'etage superieur du musee, une salle illustre les 11 civilisations succesives d'Afrasiab, et on peut remarquer feuilles d'acanthes et raisins, qui etaient alors si importants.

Si l' on revient sur ses pas vers le centre, on tombe sur la mosquee Khazrat-Khizr, reconstruction au XIX eme d'une mosquee originelle du VIII eme siecle, qu'on nous presente comme l'une des plus anciennes d'Asie.

L'interieur est simple, les Ouzbeks viennent en nombre pour une priere recitee par un religieux local, en echange d'un petit billet. Etonnant pour nous de voir que meme les locaux doivent payer pour acceder a un lieu religieux (ce n'est que 500 Soms, contre 3000 pour nous touristes, 1 euro= 3400 Soms).

Comme a chaque fois, on rale un peu pour essayer de ne pas payer plein pot a chaque "attraction" et comme a chaque fois, on arrive a avoir gain de cause, payant souvent un ticket pour deux. Ce coup-ci on tombe meme sur Malhuja, une ancienne prof de francais, qui vient s'occuper des lieux, maintenant qu'elle est a la retraite. On a donc aussi droit a un chai bien chaud et une assiette de Plov maison, avec notre petite table et la vue sur toute la ville.

On est a notre deuxieme jour a Samarcande, il fait encore un peu gris, mais on prend quand meme ces vues, depuis la mosquee, avec l'ensemble de Bibi Khanum, mere de Timur, dont nous vous parlerons avec plus de details dans un autre article. On peut voir son mausolee sur la gauche, et sa mosquee sur la droite.

Si on quitte la mosquee des voyageurs et notre ex-prof de francais, en marchant a travers un cimetiere, on arrive a ce qui est pour nous la perle de Samarcande, l'avenue des mausolees de Chah-i-Zinde. Voici les photos prises le lendemain, avec un beau soleil.

Et celle de notre deuxieme jour, un peu plus gris. On voit bien l'escalier qui se hisse sur la colline, entoure par deux rangees de mausolees qui se font face, dans des teintes bleues divines.

La mosquee qui ouvre les lieux possede les domes classiques et geometriques.

Puis on se promene dans l'enchainement des tombes des membres de la famille de Timur,  soeurs, nieces, etc.

Chaque mausolee possede une decoration interieure particuliere, on peut soit admirer le travail en stuc rehausse d'or et de bleu.

Ou rester dans des carreaux de faience bleue, sur la face externe,

puis du plafond,

jusqu'au sol. La encore, les motifs varient et la lumiere du flash permet d'apprecier la douceur de ces couleurs encore si vives.

Certiains tombeaux sont plus isoles, et peuvent ainsi faire profiter d'une vue d'ensemble,

et au sommet des marches, on arrive au coeur du lieu. En voici la porte.

Le nom Chah-i-Zinde signifie "tombeau du roi vivant" (on reconnait la racine perse Chah, qu'on retrouve dans la dynastie des Shahs Pahlavi d'Iran par exemple). Au coeur de l'ensemble repose un cousin du prophete Mohammed, Qusam Ibn Abbas, qui aurait introduit l'islam en Asie centrale au VII eme siecle. Les aristocraties regnantes ont donc voulu reposer autour de ce saint homme, avec leurs mosaiques bleutees.

  Ou leur carreaux plus colores, qui rappellent ce que nous verrons bientot en Iran.

Les details sont raffines et varies.

Mais le coeur est bien cette salle, d'un bleu plus sombre et moins exuberante, ou l'on doit entrer en groupe, le temps de s'accroupir pour participer a une priere, avant de quitter les lieux.

Nous avons adore deambuler parmi ces tombeaux, et on aurait pu vous les montrer tous en photo tant la variete est grande,

mais on s'arretera ici, avec ce dernier interieur creme.

Etonnamment, certains mausolees sont si proches que l'on peut difficilement profiter d'une vue d'ensemble de leur facade.

On quitte les lieux, en repartant par notre cimetiere, avec des tomes recentes qui beneficient d'un superbe cadre.

Et de l'autre cote de la rue, l'ensemble de Bibi Khanum nous domine encore.

Au pied de la mosquee de bibi Khanum, se trouve le bazar Siob, dont on peut juger que la restauration recente l'a trop transforme,

mais qui en tout cas rend heureux les pigeons, puisque les miettes de nougat que vous ferez gouter cette vendeuse, sont predecoupees par un pigeon malin.

Samarcande est aussi celebre pour ses pains ronds et lourds (1kg), dont voici deux exemples un peu fantaisie.

Et cet amas de masse colore, ce n'est autre qu'une delicieuse variete locale de betterave, que les vendeuses vendent encore chaudes et sucrees et qu elles nous font gouter. Un vrai regal.

Pour se restaurer, il existe bien sur quelques chaikhana, notre choix se porte ce midi la sur du poisson. On ne pourra pas vous dire quel est son nom, c'est en tout cas de riviere, precuit, vous dites le poids que vous desirez avaler (1 kilo coute 24000 soms, soit 9 euros).

On vous les fait frire ensuite, dans ce bain d'huile et d'epices.

Et on se regale ensuite, avec les mains, sur une des tables en plastique au chaud a l'interieur.

L'endroit n'etant pas tres vaste, on s'est retrouve a partager notre table avec une vieille dame, remplacee ensuite par Gulayo, prof d'anglais de Boukhara en visite en ville,

et son mari Laziz. Si vous avez jusqu'a maintenant vu beaucoup moins de photos de gens rencontres sur le chemin, c'est que le contact avec les Ouzbeks passe un peu moins bien que d'habitude. Beaucoup de gamins sont carrement moqueurs, les adultes sont souvent la pour trouver un moyen de faire de l'argent, On apprecie d'autant plus les rencontres comme avec ce couple sympathique.

Pour notre troisieme jour a Samarcande, on change un peu de climat, avec une belle couche de neige qui viendra deux jours de suite decorer la ville.

Et la statue de Timour sur l'avenue en direction de la ville russe est elle aussi recouverte d'une cape blanche.

Ville russe qui est en partie de l'epoque sovietique, avec le quartier de la gare et du parc Navoi, mais qui conserve aussi quelques batiments de l'epoque tsariste, dont notamment deux eglises, la premiere de l'assomption de la Vierge, orthodoxe.

avec son classique iconostase en bois.

Et une deuxieme eglise russe catholique, dont on ne verra que la grille,

qui ne laisse pas de doutes sur le patron des lieux.

On finira cette journee autour d'un delicieux plat de Laghman, mais dans un restaurant specialise. On aura donc droit a une version ouighour (pays d'origine de ces pates) dont la viande en sauce sera delicieusement epicee (d'anis etoile et de cannelle).

Pour continuer dans le parcours historique de la ville, il faut presenter l'observatoire astronomique d'Ulug Beg, neveu de Timur, qui lui succedera, et qui en 1420 se fera construire un astrolabe de 3 etages, lui permettant de calculer distances des etoiles et autres mesures astronomiques. On n'en oublie pas pour autant les decorations des edifices.

Voici la porte d'entree de la partie souterraine,

qu'on peut encore visiter. On peut voir ici les graduations du limbe.

Et la statue d'Ulug Beg, qui trone au pied de son observatoire, est aussi une etape sur le parcours photo des mariages. Malgre le froid glacial qui regne!

Pour poursuivre avec les lieux importants, venons en maintenant a Gour-E-Amir, mausolee de Timur, ou repose egalement Ulug Beg. C'est le deuxieme joyau de la ville, apres la place du Registan, le voici sous la neige,

et son ensemble est peut etre le plus photogenique, comme on peut le voir sur la porte d'entree.

Il est situe sur une place degagee, ou se trouvent d'autres mosquees de moindre importance,

avec du soleil, on profite de la simple harmonie du mausolee Rukhabad.

Et a travers un mur hideux qui vise a simplement cacher les quartiers d'habitation, parfois un peu vieillots, de la vue des touristes, on distingue le joli Ak-Sarai.

Ici la richesse des decors interieurs recemment renoves eclate avec le flash,

on se croirait presque dans un palais, plutot que dans un lieu de recueillement.

Et les enfants du quartier, profitent de la neige pour de belles batailles.

Comme le mausolee de Gour-E-Amir se trouve a deux pas de notre Guest House, on passe plusieurs fois par jour devant, l'occasion de prendre une photo avec la cuvee de Creve Coeur, qui en ce 28 novembre vit ses dernieres heures de voyage, puisqu'on compte se la boire pour l'anniversaire de Cindy.

La lumiere du soleil permet de varier l'intensite des couleurs de la porte d'entree,

et l'imposant interieur est de tout temps splendide. On est happe par le volume des lieux, et la richesse des decorations,

ou reposent les pierres tombales de Timur, en jade vert, au centre, entoure de plusieurs de ses successeurs, dans une profusion de marbre peu habituelle.

Vu de l'arriere, la coupole ne semble pourtant pas si immense.

Et de nuit, le site eclaire possede aussi son charme,

Voici la vue que nous avions depuis la porte de notre chambre, le matin lorsque nous descendions prendre le petit dejeuner,

Pour finir le panorama des lieux visites a Samarcande, et en attendant l'article sur le complexe de Bibi Khanum et sur le Registan, deux photos du curieux tombeau du prophete Daniel, avec ses 5 petites coupoles. De l'exterieur, on a envie de se dire, c'est un peu long pour un simple tombeau,

mais a l'interieur on se rend compte que Daniel est en fait a l'etroit, puisque selon la legende, son corps grandit de 2,5 cm par an, on en est actuellement a 18 metres... comme quoi, les religions n'empechent parfois pas de croire un peu a n'importe quoi (a vous de juger de la frequence du "parfois").

Pour terminer avec le moment religion, on a aussi parcouru le quartier juif, ne trouvant par contre personne pour nous ouvrir la synagogue locale.

On n'aura pas de chiffres pour ce coup-ci, mais quelques photos assez rigolotes sur le detail de la maison, dont meme les gouttieres s'affichent,

ainsi que la porte.

Et voici le deuxieme mur, qui cache a la vue de la rue commercante et clinquante qui va de Bibi Khanum au Registan, l'ancien quartier juif et ses ruelles tortueuses. Ca vous dit beaucoup sur la conception du tourisme a Samarcande.

Si on rajoute a cela la multiplication des tickets d'entree, puisque pour tout il faut payer ici (ce qui fait une grosse difference avec Boukhara, ou seuls deux lieux etaient payants), qui souvent se transforment en "le prix d'un ticket pour deux" que le controleur se met tranquillement dans la poche, et sans trop vous reveler le business des surveillants policiers qui vous proposent de monter en haut du minaret pour 10 000 Soms par personne, on se sent TROP dans le business tourisme bien qu'on soit hors saison...

On se refugie donc le soir, pour celebrer l'anniversaire de Cindy, 30 ans qu'elle atteint sur la route, dans un restaurant ouzbek a l'ambiance un peu mouvementee, mais ou on deguste avec un plaisir profond le vin de Pablo, accompagne de salades et de viandes.

Le cadeau sera un crochet, apres nos deux mois en Inde, par la Malaisie, en chemin vers la Chine que nous atteindrons en arrivant par Hong-Kong. Une dizaine de jours a deguster quelques specialites, decouvrir sans doute une ile et profiter de la chaleur des tropiques...

En attendant, voici Cindy qui paye notre repas du soir, qui malgre les apparences, ne nous a pas ruine...